Le géant de l’immobilier Evergrande ne cesse de s’effondrer. Une chute qui illustre les difficultés de l’économie chinoise. Une crise immobilière qui touche des fondamentaux de l’épargne populaire chinoise.



Evergrande : plus dure sera la chute

Comment dit-on en chinois « quand le bâtiment va mal, tout va mal » ? « Evergrande », non ?

Fin janvier 2024 : mise en liquidation à Hong Kong

La société qui a accompagné le développement de la Chine pendant plusieurs années vient d’être mise en liquidation par un juge de Hong Kong. Cela faisait pratiquement deux ans que les magistrats demandaient aux dirigeants d’Evergrande un plan de redressement. Un moyen d’apurer la dette gigantesque de 300 milliards de dollars du promoteur ! Après une énième relance, le tribunal a décidé de siffler la fin de la récréation : liquidation !

De la difficulté de récupérer les actifs d’Evergrande

Même si le tribunal a désigné des « liquidateurs » réputés pour leur célérité à récupérer des créances, notamment en Chine, il est prévisible que les actifs chinois d’Evergrande soient inaccessibles. Ils représentent près de 90 % du patrimoine de l’entreprise. Aussi, les 300 milliards de dette ne sont pas près d’être recouvrés. Pour y arriver, il faudrait que la justice chinoise valide la décision du tribunal de son territoire semi-autonome. Ce qui est loin d’être gagné.

Le retrait des investissements de l’étranger

Depuis quelques années, et surtout depuis le COVID et ses confinements aussi durs que répétitifs en Chine, les investisseurs étrangers ont commencé à quitter l’Empire du Milieu. La série de « disparitions » de PDG et la multiplication de règlementations contraignantes ont fini de dégoûter les businessmen étrangers. Près de 80 % des actifs ont ainsi été retirés des bourses chinoises. Pour les autorités, cette mauvaise nouvelle s’accompagnait en plus du constat que l’argent investi en Chine restait en Asie, mais dans d’autres pays comme l’Inde notamment. Au moment de l’annonce de la faillite d’Evergrande, le gouvernement de Pékin avait décidé d’injecter 280 milliards pour tenter de redresser le secteur de l’immobilier.

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L’immobilier : une épargne populaire de la Chine en difficulté

La Chine a connu un boom immobilier cette dernière décennie pour deux raisons :

  • Un appétit important des épargnants chinois pour ces investissements ;
  • Une volonté importante du gouvernement de développer ce secteur.

Le rêve de l’accession à la propriété

L’achat d’un appartement a longtemps été un aboutissement pour les travailleurs en Chine. Tout a été fait pour que chacun puisse réaliser ce rêve : un accès au crédit facilité et un système de VEFA (vente en l’état de futur achèvement), autrement dit sur plan. Et parce qu’en Chine tout est « gigantesque », des programmes de plusieurs dizaines de milliers de logements sortaient de terre en quelques mois. Cette dynamique accompagnait ainsi le développement économique du pays. Les ouvriers gagnaient des salaires, empruntaient et se logeait en achetant un appartement.

Au moment du COVID, la belle dynamique économique s’est enrayée et a bien du mal à repartir aujourd’hui. Entretemps, de nombreuses sociétés de promotion immobilière ont fait faillite et pas seulement Evergrande. Des tours entières sont encore en construction… sans date de livraison prévue.

Béton maudit : le placement préféré des Chinois s’effondre

On ne peut pas vraiment parler de « pierre » quand on évoque la construction chinoise. Ici le béton est roi ! Avec le robinet du crédit ouvert, l’immobilier est devenu le placement numéro 1. Avoir un bien pour le louer semblait un investissement sûr. Mais une nouvelle fois, quand la machine économique s’est grippée, le besoin en location d’appartements s’est considérablement réduit. Des (centaines de) milliers d’appartements construits sont restés vides. Les investisseurs n’arrivaient plus à payer leurs mensualités et se sont mis à vendre à tour de bras. Conséquence : les prix se sont effondrés. Mais surtout, avec un tel parc d’appartements sur le marché, les nouveaux programmes de construction ne trouvaient plus preneur. On a vu des « destructions » d’immeubles pour resserrer le marché. Diminuer l’offre immobilière physiquement permettait un maintien des prix (à défaut d’une hausse).

Un appétit grandissant d’or

Puisque le placement « sans risque » se révèle bien fragile, les Chinois ont visiblement décidé de se rabattre sur un autre actif tangible ces derniers mois : l’or. Ce n’est finalement qu’un retour aux sources culturelles de l’épargne dans ce pays. En 2023, les achats d’or en joaillerie ont augmenté de 60 tonnes par rapport à 2022. La consommation d’or en général dans ce pays a atteint 1 000 tonnes soit 9 % de plus que l’année précédente. Même les jeunes semblent investir dans le métal précieux. Les bijoutiers ne s’y sont pas trompés puisqu’à Pékin et dans les grandes villes, on trouve des bijoux en or aux formes modernes comme des « perles d’or » qui font fureur auprès des moins de 30 ans.

Ce qu’il faut retenir :

  • Evergrande en faillite à Hong Kong : les actifs de l’entreprise en Chine seront difficiles à récupérer.
  • Les épargnants chinois achètent leur appartement à crédit et en VEFA. De nombreux programmes ne sont pas livrés.
  • En Chine, on détruit des immeubles pour réduire l’offre.
  • Les Chinois préfèrent aujourd’hui l’or pour placer leur épargne.