Chaque jour, le cours de l’or se décide à plusieurs milliers de kilomètres de nos lingots et de nos pièces. Dans un bâtiment anonyme de New York, sur des serveurs qui tournent à la microseconde près, s’échangent des millions de contrats portant sur le métal jaune. Ce lieu discret, c’est le COMEX, une institution presque centenaire dont les décisions influencent directement la valeur de l’or à travers le monde. Pour l’investisseur particulier comme pour le détenteur d’or physique, comprendre le COMEX, c’est saisir le cœur même du système de fixation des prix.
Ce qu’il faut retenir
- Le COMEX, fondé en 1933 à New York, est la place mondiale de référence pour les métaux précieux.
- Il repose sur des contrats à terme : la majorité des échanges concernent de “l’or papier”, pas de l’or physique.
- Chaque jour, plus de 700 tonnes d’or papier s’échangent pour à peine 30 à 40 tonnes livrées réellement.
- C’est le COMEX qui détermine le prix spot mondial de l’or, repris par toutes les autres places (LBMA, Shanghai, etc.).
- Le marché est réglementé par la CFTC mais régulièrement critiqué pour sa dimension spéculative.
- Pour l’épargnant, comprendre le COMEX permet de mieux saisir d’où vient le prix de son or, qu’il soit physique ou dématérialisé.
- Le COMEX donne le prix ; l’or physique garde la valeur.
Aux origines du COMEX : quand New York invente le marché à terme
Le Commodity Exchange Inc., plus connu sous le nom de COMEX, naît en 1933, au cœur de la Grande Dépression. À l’époque, les États-Unis cherchent à structurer le commerce des matières premières, dont les cours fluctuent violemment sous l’effet des crises agricoles et industrielles.
Quatre petites bourses new-yorkaises, spécialisées respectivement dans le coton, le caoutchouc, la soie et le café, décident alors de fusionner pour créer un marché commun capable d’offrir aux producteurs et aux acheteurs une protection contre la volatilité des prix.
L’idée fondatrice : permettre à un vendeur ou à un acheteur de fixer dès aujourd’hui le prix d’une livraison future. Ce mécanisme, qu’on appelle contrat à terme ou futures contract, repose sur une logique simple mais révolutionnaire :
- un producteur vend à l’avance une quantité donnée de métal (ou de blé, ou de pétrole), à un prix fixé pour une date future ;
- un acheteur s’engage, de son côté, à payer ce prix à l’échéance.
Ainsi, chacun se couvre contre les aléas du marché.
Un mineur d’or sait combien il gagnera dans six mois, même si le cours baisse ; un industriel peut planifier ses coûts, même si le prix du métal flambe.
Le succès du modèle est fulgurant. Dans les années 1970, après la fin de l’étalon-or (1971), les métaux précieux deviennent à leur tour négociables sur le COMEX. C’est une révolution : l’or quitte la sphère monétaire pour entrer dans celle des marchés financiers.
L’institution devient alors la référence mondiale pour les métaux précieux, au même titre que le NYMEX (New York Mercantile Exchange) l’est pour le pétrole.
En 1994, le COMEX fusionne avec le NYMEX pour former le New York Mercantile Exchange Group, avant d’être absorbé à son tour par le Chicago Mercantile Exchange (CME Group) en 2008.
Aujourd’hui, il opère comme une division du CME, la plus grande plateforme de dérivés financiers au monde. Et depuis, chaque jour, des milliards de dollars s’y échangent, souvent sans qu’un seul gramme d’or physique ne change de main.
Comment fonctionne le COMEX aujourd’hui
Sur le COMEX, on ne s’échange pas de l’or sous forme de lingots, mais des contrats à terme, c’est-à-dire des promesses de livraison.
Chaque contrat standard correspond à 100 onces d’or (environ 3,11 kilos). Les traders, banques, fonds d’investissement et industriels peuvent acheter ou vendre ces contrats, selon leurs anticipations du marché. Mais il faut bien comprendre une chose : seule une infime partie de ces contrats aboutit à une livraison réelle.
En effet, la majorité est liquidée avant l’échéance : les opérateurs se contentent de solder leurs positions et d’encaisser la différence entre le prix d’achat et le prix de vente. Autrement dit, le COMEX est un marché de prix, pas de métal.
Quelques chiffres illustrent cette disproportion : selon les données du CME Group, il s’échange en moyenne chaque jour l’équivalent de 25 millions d’onces d’or papier, soit environ 700 tonnes, alors que les livraisons physiques mensuelles dépassent rarement 30 à 40 tonnes. Le rapport entre “or papier” et “or physique” dépasse donc 20 pour 1. Et parfois bien plus.
Ainsi, c’est ce marché virtuel qui détermine le cours spot mondial de l’or. La raison est simple : le COMEX concentre la plus grande liquidité (le plus grand nombre d’acheteurs et de vendeurs) et sert de base aux arbitrages internationaux. Les autres places boursières, comme le London Bullion Market (LBMA) ou la Shanghai Gold Exchange (SGE), s’alignent sur ses cotations.
Le COMEX et le cours de l’or : finance contre réalité
Le COMEX joue donc un rôle central dans la fixation du prix de l’or, issu de la confrontation entre offre et demande. Mais ce rôle fait aussi débat, car si l’or est historiquement un actif tangible, le marché du COMEX repose en grande partie sur des instruments financiers dérivés, c’est-à-dire des paris sur le prix futur du métal.
Une référence mondiale
Le prix “spot” de l’or affiché chaque jour, en dollars par once, est une moyenne pondérée des contrats les plus actifs sur le COMEX. Il ne représente pas TOUT le marché, seulement les positions les plus importantes. Ce prix sert ensuite de référence aux ventes physiques dans le monde entier, qu’il s’agisse d’un bijoutier en Inde ou d’une banque centrale en Europe.
Une influence parfois critiquée
Mais cette domination a un revers : la part très faible de métal effectivement livré nourrit les critiques. Certains analystes estiment que le COMEX ne reflète plus le marché réel de l’or, mais plutôt celui des positions spéculatives des grands acteurs financiers. Le risque : une déconnexion entre la valeur “papier” et la valeur “physique” du métal.
Des enquêtes ont même mis en lumière des manipulations de cours par certaines grandes banques (notamment JPMorgan et Deutsche Bank, sanctionnées en 2020 par la CFTC (U.S. Commodity Futures Trading Commission) pour spoofing, c’est-à-dire des ordres fictifs destinés à tromper le marché. Ces affaires ont entamé la confiance d’une partie des investisseurs particuliers, qui préfèrent désormais, à juste titre, détenir de l’or réel plutôt que des positions électroniques.
Pourquoi le COMEX reste essentiel pour les investisseurs
Malgré ses paradoxes, le COMEX reste le poumon du marché mondial de l’or. Il concentre la liquidité, fournit un prix de référence universel et permet aux acteurs de se couvrir contre les fluctuations extrêmes du marché. Sans lui, les échanges d’or physiques ou numériques seraient bien plus chaotiques, car chacun fixerait son prix selon ses propres critères.
Un outil de couverture pour les professionnels
Pour les banques, les raffineries, les fonds d’investissement ou les joailliers, le COMEX n’est pas un casino : c’est un instrument de couverture. Prenons un exemple concret :
Une société minière sud-africaine prévoit de livrer 5 tonnes d’or dans six mois. Pour se prémunir contre une éventuelle chute du cours, elle vend dès aujourd’hui des contrats à terme sur le COMEX au prix actuel. Si, à la livraison, le prix a baissé, les pertes sur le marché physique seront compensées par les gains sur le marché à terme. Ce mécanisme de hedging (couverture) stabilise les revenus des producteurs comme des acheteurs.
C’est la fonction originelle du COMEX, et elle demeure essentielle.
Une boussole pour les investisseurs particuliers
Pour les particuliers, le COMEX est la source du prix de l’or affiché sur toutes les plateformes du monde : qu’il s’agisse d’un lingot acheté chez un négociant français, d’un compte métal sur Veracash, ou d’un ETF coté à Paris. Même les marchés asiatiques, pourtant très dynamiques, ajustent leurs cotations à partir des références américaines.
Mais attention : ce lien direct entre le marché financier de New York et l’or que l’on détient réellement mérite d’être compris. Car le COMEX fixe un prix “virtuel”, purement financier, tandis que le détenteur d’or physique, lui, détient un actif tangible, dont la valeur réelle dépend aussi de la demande physique mondiale (bijouterie, banques centrales, investissement).
Autrement dit, l’or papier et l’or métal dialoguent sans jamais se confondre : le premier donne le tempo, le second incarne la valeur (le pouvoir d’achat du capital investi).
Le rôle de la régulation
Le COMEX est étroitement surveillé par la CFTC, le régulateur fédéral américain, qui contrôle les volumes, les positions ouvertes et les limites de spéculation. Chaque semaine, la CFTC publie le fameux rapport Commitments of Traders (COT), qui détaille la répartition des positions entre acteurs commerciaux (hedgers) et non commerciaux (spéculateurs).
Ce rapport, disponible publiquement, est scruté par tous les analystes : il révèle l’état d’esprit du marché. Un excès de positions longues (acheteuses) ou courtes (vendeuses) peut anticiper des mouvements de prix à court terme.
Ainsi, le COMEX reste le thermomètre financier de l’or, malgré toutes ses limites. Mais il n’est pas le métal lui-même. Et c’est là que réside la distinction essentielle.
L’or : entre New York et le coffre-fort
Si le prix de l’or se décide à New York, sa véritable valeur se conserve ailleurs : dans les coffres, les lingots et les mains des épargnants.
Le COMEX donne le ton, on l’a dit, mais c’est la détention physique qui incarne la confiance. Les crises successives l’ont rappelé : les contrats électroniques s’effacent à la vitesse d’un clic, mais une once d’or, elle, ne disparaît pas. C’est pourquoi de plus en plus d’investisseurs cherchent à se reconnecter à l’or tangible, qu’ils conservent dans des coffres, chez eux (même si c’est risqué) ou encore sur des plateformes comme Veracash.
Pour parler du modèle de Veracash justement, l’utilisateur détient un actif réel, stocké, assuré et disponible à tout moment, tout en bénéficiant d’une liquidité immédiate grâce à une carte Mastercard adossée à ses métaux. Autrement dit, le meilleur des deux mondes : la flexibilité du numérique et la solidité du métal.
Alors certes, l’or coté à New York fixe le cadre, mais c’est l’or détenu en coffre qui ancre la confiance. Entre les deux, tout l’équilibre d’un marché vieux de 5 000 ans.
Bibliographie
- U.S. Commodity Futures Trading Commission (https://www.cftc.gov)
- Cours de l’or Veracash (https://www.veracash.com/fr/cours-or)
- CME Group (https://www.cmegroup.com)
Multi-entrepreneur, auteur et consultant depuis plus de vingt-cinq ans dans le domaine de la communication stratégique, il a plusieurs fois travaillé pour le compte d'entreprises financières dont il décrypte aujourd'hui les coulisses et les mécanismes économiques de base à l'intention du plus grand nombre.



