Depuis plusieurs jours, les grandes banques européennes sont attaquées en bourse. Est-ce un dommage collatéral des faillites des banques californiennes et du Crédit Suisse ? Ou une stratégie délibérée des marchés qui veulent obtenir des banques centrales l’arrêt de l’augmentation des taux d’intérêts ? Des analystes penchent pour la deuxième hypothèse. Un jeu pourtant très dangereux pour le système bancaire dans son ensemble !

La remontée des taux met les banques en difficulté

Dans cette série de faillites de SVB, Signature, etc. et de sauvetage express du Crédit Suisse, il y a une constante : un manque de liquidités. Et à chaque fois, c’est la remontée des taux d’intérêts par la FED et la BCE qui est responsable.

Des bons perdants

Après plusieurs années de taux quasiment négatifs, le retour de taux au-dessus de 3 %, pour les bons du Trésor, a rebattu les cartes. Les banques, qui avaient sécurisé leurs actifs dans des emprunts d’Etat, ont eu des difficultés à les revendre. 

Normal, alors qu’elles détenaient de la dette à taux zéro ou presque, le même produit promet aujourd’hui plus de 3 % de rendement. Même si le différentiel semble minime, il serait un peu idiot de choisir le produit qui ne rapporte rien ! C’est pour cette raison que les banques en difficultés ont voulu lever des fonds, pour reconstituer leur stock d’actifs.

Rien à voir avec la crise des subprimes et c’est bien le problème !

Alors la finance n’a rien appris de 2008 et de la crise des subprimes ? 

Si on est positif, on va dire que si justement. 

Mais malheureusement, aux mêmes effets, des causes différentes. D’ailleurs, les autorités financières avaient mis en place des procédures de contrôle pour éviter la présence d’actifs « pourris » dans les comptes des banques. 

Dans le cas des récentes faillites californiennes et du sauvetage du Crédit Suisse, il n’y a absolument pas ce type d’actifs dans les comptes. Des pratiques très discutables pour le Crédit Suisse sans doute, mais qui ne sont pas directement liées aux difficultés du mois de mars. 

En effet, on ne peut pas reprocher à des gestionnaires d’avoir investi dans des emprunts d’Etat, des placements sûrs au même titre que l’or.

Nouveau call-to-action

La guerre est déclarée entre les banques centrales et les marchés

Il est étonnant de voir l’écart qu’il y a entre les discours très rassurants des autorités et les marchés.

  • Pas de risque sur les banques : 

« Il n’y a pas lieu de s’inquiéter pour la Deutsche Bank selon Olaf Scholz le chancelier allemand ; pas de risque pour les banques françaises pour Bruno Le Maire, ministre de l’Économie ; Christine Lagarde à la tête de la BCE a relevé de 0,5 % ses taux directeurs pour les conduire à 3,5 et tenter de réduire l’inflation considérant sans doute que cela ne pose pas de difficultés aux banques.

  • Les banques massacrées en bourse :

Cela ne semble pas du tout l’avis des marchés qui ne cessent de massacrer les valeurs bancaires sur les places européennes. Moins 10 % environ pour l’action de la banque allemande, -6 % pour la Société Générale, -5 % pour BNP. Les actions des banques ne sont pas à la fête.

Faire trembler les banques systémiques comme moyen de pression sur les banques centrales

Cette différence de point de vue est en train de tourner à l’affrontement. Le monde de la finance souhaite clairement que les banques centrales mettent fin à leur politique de resserrement monétaire pour freiner l’inflation. Pour les marchés, le remède semble pire que le mal

Les économies commencent à avoir du mal à se financer :  l’argent est plus cher et plus rare. Mais l’inflation se poursuit. C’est la double peine. Et les difficultés des banques en sont l’illustration. Avec un peu de mauvais esprit, on peut se dire que les investisseurs n’ont pas envie de voir, non plus, leur patrimoine s’envoler dans des faillites bancaires. La SVB, notamment, avait pas mal de fonds d’investissement dans ses clients. 

Vendre des actions de banques, c’est montrer publiquement la perte de confiance, c’est un moyen d’expression des marchés. La FED, la réserve fédérale américaine a visiblement reçu le message 5/5 avec l’annonce d’un ralentissement de l’augmentation des taux : 0,25 en mars et « peut-être » encore 0,25 dans l’année. Et ce, malgré des chiffres de l’inflation encore élevés.

 Si les autorités financières américaines ont réagi si vite, c’est sans doute parce qu’elles ont été obligées de sauver le patrimoine de citoyens placé sur des comptes dans des banques qui ont fait faillite. 

Pour l’instant, en Europe, cela n’a pas été nécessaire. Le gouvernement suisse a quand même ouvert une ligne de crédit de 50 milliards de francs suisses pour sauver un de ses fleurons.


Benjamin Rosoor

Je suis entrepreneur sur le web depuis 1999. Diplômé de l'école de journalisme de Bordeaux, j'ai tout d'abord été journaliste-reporter radio pendant 10 ans. J'anime plusieurs médias sociaux et blogs sur les entreprises, la tech, la finance, le marketing digital.